La Rose noire


La Rose Noire
La jeune fille se réveilla en sursaut. Prise d'une douleur aiguë, elle appuya de ses deux mains le point qui lui faisait mal. Tout son côté gauche semblait la brûler, un point sur son cœur lui paraissait se percer. La souffrance était telle qu'elle cessa de respirer quelques secondes. L'apogée de cette épreuve arriva alors. Elle eu l'impression de mourir pendant un temps qui lui parut une éternité. Cet instant resta en suspens, interminable, puis la douleur commença à refluer.
Enfin, Saphyra recommença à respirer. Sa souffrance s'apaisa jusqu'à devenir une sensation de mal-être permanent, une partie de son corps qu'elle ne pouvait ignorer complètement. Peu à peu, elle recouvra ses esprits. Exténuée, elle essuya la sueur qui perlait son front, tout en soupirant. Sans attendre, elle se leva et se dirigea vers la salle de bain. Il était tôt, mais elle savait qu'elle ne pourrait plus dormir. La jeune fille alluma le radiateur et se déshabilla avant d'entrer sous la douche. Elle resta sous l'eau froide quelques minutes, profitant du jet qui massait son corps. Après s'être savonnée et nettoyée, elle sortit, agrippa une serviette et l'enroula autour d'elle. Elle laissa ses cheveux mouillés rouler en cascade dans son dos, puis se regarda dans la glace de la taille du mur pour se détailler. C'était une jeune femme assez petite pour son âge. Toutefois, elle avait des formes généreuses, elle le savait pertinemment. Elle n'avait pas la peau mate, mais assez foncée tout de même pour attirer le regard. Des cheveux châtains très longs, qu'elle aimait qualifier de neutre, des yeux d'un bleu très pâle, des joues avenantes, une fine bouche… en un sens, elle pouvait se considérer comme jolie. Pas belle, ni séduisante, mais jolie. Elle vérifia plus précisément son regard et fut satisfaite de ce qu'elle vit. C'est-à-dire rien. Presque rassurée, elle retourna dans sa chambre et s'assit en tailleur sur son lit. Puis elle se pencha pour attraper son sac à dos et en tira son ordinateur portable. Elle l'avait acheté à peine un mois plus tôt, exigeant la dernière qualité sortie. Si elle voulait réussir, il lui fallait toujours le plus haut niveau de la technologie. Pendant que le PC chargeait les configurations de démarrage, Saphyra prit aussi une de ses barres chocolatées. Ce n'était pas beaucoup pour un petit déjeuner, mais cela lui suffisait amplement ! Elle tapa son mot de passe, tout en avalant un morceau de chocolat. Lorsque sur l'écran apparut une photo d'une chienne au pelage blanc jouant avec une chaussette, la jeune fille sortit un dossier de son sac à dos. C'était en fait une simple chemise cartonnée avec le nom d'Alex MARIO noté dessus. Avant de l'ouvrir, elle regarda l'heure. Il était 3h27 du matin. Elle avait du temps à perdre avant son rendez-vous. Se retenant de soupirer, l'adolescente cliqua sur l'onglet d'Internet et tapa une recherche sur ce nom, tandis que de son autre main, elle terminait son repas et ouvrait le dossier. Elle l'avait obtenu par l'une de ses sources, qu'elle changeait régulièrement pour ne pas prendre de risques inutiles. La première chose qu'elle trouva dans ce dossier fut un chèque. Il était blanc et signé, malgré le contrat qu'elle avait accepté. Elle l'ignora et le poussa pour voir le reste du dossier. Une photo était présente, représentant la cible en pleine conférence de presse. Il était apparemment grand, avec des cheveux noirs, des yeux verts, des épaules carrées, un nez fin, un front élancé… séduisant en soi. Tout ce qui pouvait représenter la réussite était aussi présent, à travers une montre, un portable laissé sur le bureau, un costume visiblement cher, une chaîne en or autour du cou… Saphyra en fut presque dégoûtée et retourna la photo. Les papiers suivants étaient des relevés de comptes. L'un portait sur un compte en Allemagne, l'autre en France, en Suisse, aux Etats-Unis, au Japon et une multitude de différents dans le monde entier. Elle passa les papiers sans s'attarder sur les détails, connaissant déjà les caractéristiques de ces comptes qu’elle avait pu observer par le passé. Puis elle arriva au plus intéressant : il y avait là la liste des sociétés  que la cible possédait, celle de ses résidences, de ses placements en action, de ses contacts… Saphyra prit le temps d’étudier et d’analyser chaque feuille, mémorisant tous les noms qu’elle lisait, toutes les informations importantes, comme les codes ou les adresses. Dans le même temps, elle cliqua sur le premier lien qu’Internet lui fournissait et trouva un blog entièrement dédié à l’une des conférences d’Alex Mario. Il expliquait apparemment que le milliardaire voulait ouvrir un parc protégé pour les loups sauvages. Un autre lien montrait un reportage sur les usines de cet homme, puis un autre sur sa biographie, sa famille, son association caritative… Elle vérifia toutes ces informations sur le dossier, qui montrait une toute autre facette de ces activités…
En réalité, les usines d’Alex Mario n’étaient pas des fabriques d’appareils ménagers, mais des façades pour la plupart, dans le but de concevoir de la drogue en grande quantité et certains étaient même des bâtiments pour d’autres trafics illégaux, tels que médicaments, organes humains, animaux sauvages, prostituées, faux papiers… Cet arnaqueur était connu dans tous les domaines. Sauf un, qu’il avait d’ailleurs décidé d’intégrer peu à peu dans les mois prochains : la vente d’armes. Saphyra ne put s’empêcher de constater que cet homme était puissant et intelligent. Il avait aussi du charisme et, fait indéniable, de l’instinct, car c’était un moment idéal pour s’intéresser au trafic d’armes. Quant à son action caritative, ce n’était rien d’autre qu’un moyen de détourner de grosses sommes d’argent. Alex Mario avait donc construit une quantité de réseaux infaillibles autour de lui. Il avait créé son univers et le maniait d’une main de maître, avec des règles apparemment strictes.
Toutefois, contre toute attente, sa dernière acquisition, une villa avec un immense terrain, lui servait de parc pour les loups sauvages qu’il accueillait. En effet, c’était un amoureux des loups et il avait engagé toute une équipe pour s’occuper d’une petite meute dont personne, à part ses proches collaborateurs, ne connaissait l’existence. C’était une facette étrange chez ce genre de personnage et la jeune fille se promit de creuser un peu plus dans ce sens-là.
Elle termina de se renseigner dans les détails, puis elle éteignit l’ordinateur et le rangea dans son sac, tout comme le dossier. Les recherches qu’elle pouvait faire seule étaient terminées. Il fallait maintenant qu’elle aille trouver les quelques détails qui lui manquaient pour organiser correctement sa mission. Elle regarda l’heure : 5h06. Il était temps de partir de l’hôtel dans lequel elle s’était réfugiée la veille, suite à une pluie torrentielle. Saphyra sortit donc de son sac des vêtements et enfila un débardeur et un jogging. Puis elle mit son I-Pod dans sa poche et ses écouteurs dans les oreilles. Installant la sangle de son sac sur son épaule, elle sortit en laissant la clé dans la chambre et partit sans déranger l’accueil, la nuit étant payée d’avance. D’abord à pas lents, elle attendit d’être à une centaine de mètres de l’hôtel pour se mettre à courir. Elle avait un rendez-vous à 8h00, à près de 20km de là… Elle accéléra. C’est avec le sourire qu’elle se dit qu’elle serait en avance une fois de plus !

Commentaires

Articles les plus consultés